Le marché de la réalité virtuelle affiche une décroissance en 2020 marquée par les multiples impacts de la crise pandémique. Mais selon les derniers retours IDC, ce n’est que pour mieux rebondir dans les prochaines années.
Cette observation n'est pas uniquement due à la crise, le marché de la VR est moins dynamique que prévu. Notamment parce que la technologie, relativement onéreuse pour des casques de qualité, a du mal à séduire un large public et que les applications « grand public » sont pour l’instant limitées.
C’est surtout le secteur du BtoB qui reste le moteur principal de cette technologie pour le moment. Pour coller à l’actualité, on a pu voir par exemple des initiatives originales comme l’usage de casques Hololens 2 dans les hôpitaux pour restreindre la proximité entre médecins et patients. Mais ce n’est pas tout !
Les applications sont nombreuses et quasi illimitées : réparer une solution chimique et sans danger, visiter des monuments lointains ou détruits (les pyramides, Notre-Dame…) ou encore faire des visites de chantier pour des employés dispersés aux 4 coins du monde…
Les formations professionnelles et les cours en réalité virtuelle se développent également massivement. Si l'usage de la techno n'est pas nouveau dans le cadre de l'apprentissage (déjà employé dès les années 1980), ces cinq dernières années ont permis de faire un bond de géant dans le domaine.
Du côté scolaire et des études, la VR aussi commence à faire son nid. Et à l'heure où les sorties scolaires ne sont plus faisables, les professeurs s'emparent de cette techno pour faire voyager les élèves.
C’est pour faire un tour d’horizon sur le marché et parler des dernières tendances que nous avions organisé le 17 novembre dernier, un webinar avec Benjamin Ray, CTO de la start-up Skyreal. Pour voir le replay, c’est ici !
Dans les dernières années un gros mouvement est apparu, qu’on a appelé les “cave”, un système de grande salle de réalité virtuelle avec écrans et capteurs - qui coûtait donc extrêmement cher. Un complexe onéreux et spacieux, pour finalement petit à petit arriver vers les HMD (visiocasques).
Le plus connu étant le HDM d’Oculus sorti au début des années 2010. C’est à partir de ce moment que les entreprises ont commencé à essayer de sortir leurs propres solutions VR. Même si on a vu les débuts de la technologie dans les années 80, c’est au début de la décennie que le secteur a explosé et que tout le monde a commencé à s’intéresser au sujet.
L'évolution des moteurs de jeu s’est faite en parallèle, si bien que depuis les années 2010, les développeurs ont décidé de commencer à migrer sur ces moteurs de jeu, comme Unity par exemple, et ne re-développent plus entièrement leur plateforme.
Chez Skyreal, les premiers pas de la VR ont été réalisés sur des technologies Virtools, qui étaient principalement axées sur le système des caves. Le problème ? Principalement l’accessibilité ! L’’accès à des salles coûtant plusieurs millions d’euros demande d’établir un processus, de réserver la salle, la préparer, faire déplacer les participants… L’idée d’Airbus (pour qui travaille principalement Skyreal) était de faire le switch d’une solution très coûteuse, vers des solutions utilisant de nouveaux moteurs de jeux. C’est ainsi qu’on a pu passer d’un marché “full cave” à un marché plutôt “full casques”.
Sur le marché de la VR, 3 gros acteurs se disputent les faveurs des entreprises : Unity, Unreal Engine et Cryengine. Le dernier est un moteur un peu moins maintenu sur la VR que ses deux concurrents. Le choix de Travailler sur Unreal pour Skyreal a été décidé sur le constat que ce moteur leur permet de travailler en open source et à l’époque, le choix de l’open source c’était le choix de la sécurité.
Avoir l’accès aux sources du moteur permet de pouvoir continuer à travailler et ce même si l’acteur venait à disparaître (ce qu'évidemment on ne leur souhaite pas). Unreal fait office de référence sur la VR car ils ont ouverts les protocoles de type XR et visent à standardiser un peu le marché. Leur idée est que tous les constructeurs de casques doivent se standardiser et arriver à un seuil où les développeurs auront à intégrer l’API pour qu’ils soient intégrés de la même manière. Le service de suivi client d’Unreal est également très fluide et très présent pour accompagner les entreprises sur le marché, plus une relation de partenariat.
Le principal atout de la VR dans l'industrie c’est l’utilisation à l’échelle 1 (en réel) vs voir son produit en échelle isométrique (2D, sans perspective). Ce qui est très liée à cette fonction c’est l’accessibilité - soit voir ce qui est faisable pour une personne en temps réel. Comment elle peut se mettre en condition et ce peut importe sa taille, son poids ou même son handicap.
L’étude de TMS (Trouble Musculo-squelettique) est également une application assez standard sur le marché. Elle vise à dépister puis à hiérarchiser les situations de travail à risque (tâche, activité, poste de travail et environnement). Les situations prioritaires qui nécessitent un diagnostic approfondi sont alors plus facilement identifiées en interne.
Le secteur de l'événementiel a dû aussi s’adapter avec la pandémie et créer des environnements virtuels pour les salons et conférences. En revanche, comme tout le monde n’a pas de casque de VR chez soi, ce sont des environnements hybrides qui ont été mis en place. Avec ce support, les possibilités s’élargissent. Par exemple, montrer votre dernier produit en affichant le modèle 3D à l’échelle réelle. Donnant ainsi au public une meilleure représentation de ce que vous lui offrez.
La visualisation multi-physique est également très demandée dans le secteur de l’industrie. On a à disposition des bibliothèques de composants, prédéfinis pour chacun des différents domaines physiques et qui permettent de modéliser et de simuler les comportement des organes ou machines dans les conditions réelles.
“Skyreal peut par exemple mesurer l’écoulement de l’air autour d’un avion, faire des études thermodynamiques quasiment en réel et à côté de l’avion au lieu de faire des plans de coupes - ce qui va économiser des mois de travail.”
Enfin, les industriels veulent (et commencent déjà à utiliser) cette technologie pour leur service marketing et communication. Que l’effet “waou” permette de vendre quasi instantanément un produit. La contextualisation aura un impact décisif sur la décision d’achat de certains produits.
Voir les évolutions de travail de tous les acteurs d’un seul projet, rapprocher deux ingénieurs qui ne sont pas sur le même site, pouvoir se former sur des outils ou processus à distance et dans le détails, des cas concrets sur des situations à risques… Les applications de la VR dans la formation sont quasi infinies.
“Chez Skyreal, tout est pensé pour travailler en collaboration. L’intérêt de la VR, c’est d’être à plusieurs pour pouvoir étudier une problématique ensemble", explique Benjamin Ray.
Champ visuel, fonction des signes vitaux mesurés, tension artérielle, rythme cardiaque... La VR peut également, grâce au logiciel Omnicept, utiliser le machine learning pour des analyses en temps réel sur la charge cognitive. Le casque capture les données de l’utilisateur et suit les mouvements des yeux, la pupillométrie, le rythme cardiaque et les expressions faciales grâce à des capteurs et 4 caméras. Si par exemple, en ouvrant une valve un incendie se déclenche, comment la personne va-t-elle réagir ? Est-ce qu’il va regarder l’extincteur à côté de lui ? Cela va permettre de tester en condition quasi réelle et placer les éléments à des endroits stratégiques.
“Avec ce système, on est capable de savoir ce que l’utilisateur regarde, si l’utilisateur est tendu ou contracté ou en situation de stress. Le business de la formation raffole de ce genre d’applications est extrêmement intéressant”.
Même si on ne peut pas se passer d’un formateur (car les algorithmes peuvent vouloir nous influencer pour résoudre une situation complexe), l’intérêt de transformer ces formations est de garantir une immersion totale - et agréable - de l’apprenant. On peut également, comme c’est le cas pour les fusées Ariane, former les ingénieurs sur des modules avant même que le produit soit fini.
Même si l’aspect humain est toujours nécessaire pour encadrer les formations, le retour sur investissement est très facilement calculé quand on sait qu’un formateur peut encadrer plusieurs utilisateurs et surtout les former plus rapidement.
On voit beaucoup de choses qui se passent du côté du streaming. On commence notamment à voir des casques qui peuvent fonctionner sans fil. Pourtant pour certains secteurs, de la donnée sans fil, c’est un potentiel risque de sécurité. On pense notamment à des secteurs comme la Défense par exemple.
Unreal a une technologie qu’on appelle le Pixel Streaming, qui permet de tout centraliser sur un serveur de calcul et de tout centraliser directement sur le device. Cette solution obligerait les clients à construire des serveurs de calculs chez eux et ce n’est pas à la portée de tous.
“Même si c’est la tendance du marché, en qualité d’éditeur de logiciel, on pense qu’il vaut mieux attendre que le produit se stabilise pour le déployer en toute sécurité. Dans le secteur de l’industrie, on va moins mettre l’accent sur un design puissant - que l’on peut voir avec les derniers jeux vidéos par exemple - que sur la fiabilité du produit. “
La VR intègre de plus en plus le monde du grand écran. On pense notamment à la série Disney “The Mandalorian”. Les décors virtuels de la série se font à distance à partir de ce qu’on appelle le ‘Brain Bar’, qui est essentiellement une sorte de banque d’ordinateurs. Ils utilisent des outils cinématographiques en VR de la même manière que pour Le Roi lion ou Le Livre de la jungle. Très souvent, les acteurs que le spectateur voit à l’écran n’est même pas sur le plateau, ce qui permet, même en période de Covid de faire 8 épisodes en à peine une année.
La réalité virtuelle est une technologie qui continue de fasciner, offrant des possibilités illimitées. Nous avons vu des exemples d’applications et sur quels secteurs sa croissance sera exponentielle (formation, cinéma notamment).
Un des points qui doit être encore réglé cependant : la motion sickness. Pour de nombreuses personnes, l’expérience de la VR se résume rapidement à une intense sensation de nausée qu’on catégorise par les motions sickness ou “mal de la réalité virtuelle". Peu d’acteurs travaillent sur le sujet car cela concerne - en fonction des études - une personne sur 1.000 ou sur 10.000. Même si elle reste assez rare, elle peut néanmoins être fulgurante et un frein pour certains utilisateurs.